X
« PAUV’MAT’LOT »

La rapidité avec laquelle la mer avait changé après que le canot eut franchi la barrière longue d’une centaine de milles aurait étonné plus d’un marin. Un grain était passé avant de s’éloigner et l’immensité de l’océan s’étendait sur tout l’horizon sans rien pour la briser. Au soleil de midi, la surface de la mer était aussi aveuglante qu’un miroir.

Bolitho se fraya un chemin jusqu’à l’avant où l’on avait établi un taud censé procurer un semblant d’intimité aux deux femmes. Catherine l’y attendait, sa chemise d’emprunt tachée de sueur, le front marqué de coups de soleil. Elle le regarda approcher, par-dessus les épaules courbées des nageurs qui prenaient un peu de repos.

Elle le guida vers le fond de la carène pour qu’il puisse se reposer contre le bordé courbe.

— Fais-moi voir ça.

Elle prit sa tête entre ses mains et souleva doucement la paupière de son œil malade.

— Je vais te faire un pansement, Richard.

Elle parlait à voix basse pour ne pas être entendue des autres. Allday était assis à la barre, immuable. Il semblait être resté immobile depuis le début. Elle faisait des gestes volontairement lents, pour ne pas révéler à Richard l’étendue de son désespoir. Voilà trois jours que Le Pluvier Doré avait glissé du récif. Après des heures et des heures de nage aux avirons, ils avaient établi leur unique mât de fortune et une voile afin de s’éloigner du fort contre-courant qui les ramenait vers le récif. Et ils faisaient grossièrement cap vers la terre. Mais, en dépit de leurs efforts et à en juger par leurs observations, ils ne bougeaient pratiquement pas. Elle essaya d’imaginer à quoi pouvait bien ressembler ce petit canot de dix-huit pieds, vu par un observateur extérieur, à supposer d’ailleurs qu’il y en eût un. Il bougeait paresseusement, retenu par une ancre flottante pendant que les hommes se reposaient, et ressemblait sans doute à une feuille morte flottant sur un lac immense et immobile. Mais à bord, dans le canot surpeuplé, les choses paraissaient bien différentes. À l’exception du marin qui répondait au nom d’Owen, celui-là même qui assurait la veille lorsque la mutinerie avait éclaté, il n’y avait que deux membres de l’équipage qu’avait commandé le mort. Elias Tucker, jeune homme timide et apeuré, originaire de Portsmouth, et Bill Cuppage, homme mûr dans tous les sens du terme, qui parlait avec le rude accent du Nord. En comptant le blessé, Bezant, qui oscillait entre délire et plaintes, ils étaient en tout treize à bord.

Elle sortit un morceau de tissu découpé dans l’un de ses sous-vêtements et l’enroula soigneusement sur le front de Bolitho pour bander son œil rougi par le sel.

Bolitho palpa le pansement en s’exclamant :

— De l’eau ! Kate, tu as pris de beau douce !

Elle ôta sa main.

— Repose-toi un peu. Tu ne peux pas être partout.

Il se laissa retomber, elle lui passa le bras derrière la tête. Ses derniers mots rappelaient à Bolitho ce que lui avait dit l’amiral Godschale. Tiens, que devenait-il, celui-là ? On avait dû lui rapporter la perte du Pluvier Doré. Il poussa un soupir. Catherine tira un peu sur la toile pour l’abriter de ce soleil impitoyable. Trois jours, et toujours aucun espoir en vue. Et s’ils touchaient terre, que se passerait-il ? Ce serait peut-être en territoire hostile, car on était dans des contrées où se pratiquait la traite et les marins de race blanche y étaient des ennemis.

Il ouvrit son œil valide et examina le canot. Les hommes s’étaient répartis en deux bordées. Ils étaient aux avirons jusqu’à la nuit, guettant le moindre souffle d’air pour établir la voile. Il vit qu’Allday l’observait. Il remâchait peut-être encore l’ordre qu’il lui avait intimé de prendre la barre et de la garder, à cause de sa vieille blessure. Ozzard était accroupi près d’un sac, occupé à faire l’inventaire des vivres restants. Le petit homme semblait avoir puisé des forces insoupçonnées dans ses nouvelles responsabilités de commis. Le secrétaire de Bolitho, ce rondouillard de Yovell, somnolait, appuyé sur le manche d’un aviron. Tout comme Jenour, il avait les mains bandées car il n’avait jamais pratiqué ce rude exercice qu’est la nage. Les coutures de sa veste étaient défaites, signe des efforts fournis.

Sans la force étonnante de Tojohns, ils n’auraient sans doute pas fait plus de quelques milles ; et Keen, recroquevillé à côté d’Owen, surveillait ce qui se passait comme pour estimer leurs chances de survie. Bolitho leva très légèrement la tête et sentit Catherine se raidir. Elle savait bien ce qu’il recherchait.

Et il la trouva, cette forme qui ne les avait pas quittés depuis le naufrage. En général, elle ne faisait qu’une apparition fugitive, mais de temps à autre, l’aileron effilé fendait la surface, comme pour bien montrer que le requin n’était pas décidé à abandonner la chasse. Il l’entendit qui lui demandait :

— A ton avis, quel a été le sort du second canot ?

La seule pensée de ce qui lui était arrivé lui était pénible.

— Le bosco a peut-être décidé de ne pas franchir le récif derrière nous. Il avait le plus gros canot et avait embarqué beaucoup plus de monde. Il est possible qu’il soit resté de l’autre côté, puis qu’il ait essayé de mettre cap sur la terre.

Mais, dans son for intérieur, il savait que le grand canot avait pu connaître le même sort que les mutins, qu’il avait chaviré dans les brisants, ou qu’il s’était échoué sur le récif. Et les requins n’ayant épargné personne, nul ne pourrait raconter ce qui s’était passé. Il poursuivit :

— Nous n’aurions pas grand-chose à manger et à boire si tu n’avais pas fait ces préparatifs. Il nous reste du fromage et du biscuit de mer, du rhum, du cognac. Bien des gens ont survécu qui n’en avaient pas autant.

Il essaya de regarder les deux barriques saisies dans le fond du canot, entre les bancs. Ils avaient de l’eau douce, mais, à treize, combien de temps leur ferait-elle ?

Catherine lui écarta les cheveux et lui dit :

— Nous allons trouver des secours, j’en suis sûre – elle tira le médaillon qui pendait dans sa chemise entrouverte et continua : J’étais beaucoup plus jeune lorsque…

Bolitho se tourna vers elle :

— Il n’y a pas plus belle que toi maintenant, Kate !

Il y avait tant d’émotion dans sa voix que, pendant une seconde, elle revit le jeune homme qu’il avait été. Peu sûr de lui, vulnérable, toujours prêt pourtant à se préoccuper des autres.

Bezant poussa un fort gémissement et s’écria :

— Pour l’amour de Dieu, aidez-moi ! – et, presque dans le même souffle – À souquer sur le bras au vent, monsieur Lincoln – et, vivement : Vous m’entendez ?

Le marin qui répondait au nom de Cuppage commença à jurer comme un charretier et lui dit sans ménagement :

— Mais tu ne vas donc jamais crever, espèce d’ordure ?

Il se contentait de dire tout haut ce que les autres pensaient tout bas. Bolitho contemplait la mer. La mer sans limite, sans pitié. Catherine s’adressa à Keen :

— Tiens, Val, vous venez nous faire une petite visite ?

Bolitho se mordit la lèvre : il n’avait même pas vu Keen qui se traînait entre les bancs et les corps épuisés, recroquevillés. Il ne valait pas mieux que Cuppage.

Keen essaya de sourire.

— Allday prétend qu’il sent le vent se lever – il tenta de se protéger les yeux du soleil qui l’aveuglait : mais je n’en vois pas trace – il jeta un regard à ses compagnons : J’ai bien peur que la blessure de Bezant n’empire. Ozzard m’a dit qu’il l’avait remarqué quand il lui a porté un peu d’eau.

— Vous croyez que ça s’infecte ? lui demanda Bolitho.

Poser la question n’avait guère de sens. Keen, tout comme lui, savait bien que c’était très fréquent. Une chirurgie réduite à sa plus simple expression, des médecins peu compétents – on disait que les hommes mouraient plus souvent des soins qu’on leur infligeait que des boulets ennemis.

Catherine les regardait, tout étonnée de la fierté qu’elle éprouvait à se trouver là avec son homme. Ses habits souillés lui collaient à la peau à cause de la sueur et des embruns, elle n’avait guère la tête à rêvasser. Même la toile sommaire que l’on avait disposée pour lui permettre de satisfaire discrètement ses besoins naturels ne lui procurait qu’une illusion d’intimité.

Pourtant, elle arrivait à s’évader un peu lorsqu’elle regardait et écoutait parler les deux êtres qu’elle connaissait le mieux en ce bas monde. L’homme qu’elle chérissait plus que tout, qu’elle aimait plus qu’elle-même, et son ami, qui semblait avoir tiré un regain de forces de ce qu’il croyait avoir laissé en Angleterre, pour le perdre peut-être à jamais.

Elle savait très bien de quoi ils parlaient, mais elle était la seule. Elle les regardait avec une attention extrême, même si elle ne vivrait pas assez longtemps pour le raconter un jour. Cet homme, ce héros pour lequel on chantait des chansons dans les tavernes, sur lequel on racontait tant d’histoires extraordinaires, cet homme capable d’inspirer courage et amour grâce à ses qualités éminentes de chef, qualités dont il était le premier à douter. Il croyait que si beaucoup l’enviaient, c’était à cause d’elle. Il ne lui serait jamais venu à l’esprit que c’était peut-être précisément l’inverse. Elle l’entendit qui disait :

— Alors, il n’en a peut-être plus pour longtemps ?

Keen hocha lentement la tête, comme si ce mouvement lui faisait mal.

— Nous devons agir pendant qu’il fait jour. Et si Allday a raison, pour le vent… – il se tourna vers Bezant, qui avait sombré dans une inconscience bienvenue : Je pense qu’il le sait très bien, amiral.

— Je vous aiderai, leur dit Catherine.

Bolitho lui serra l’épaule et fit signe que non.

— Non, Kate. Je vais aller en toucher un mot à Allday – il s’adressa à son capitaine de pavillon, envahi par une émotion soudaine : Un jour, il a extrait du corps de Val un morceau de bois gros comme une cuisse de bébé. Le chirurgien était dans les vignes de Bacchus et hors d’état de s’en charger.

Elle les regarda tour à tour. Désormais, ce n’était plus leur petit jardin privé, elle en faisait partie.

Bolitho relâcha son étreinte et murmura :

— Songe à notre maison, Kate. À la petite anse dans laquelle nous nous sommes aimés jusqu’à ce que la marée nous chasse – ses yeux s’éclairaient : Elles sont toujours là, telles que nous les avons laissées. Tu ne voudrais pas qu’elles nous oublient ?

Il se leva pour gagner la chambre, touchant ici une épaule, disant là un mot d’encouragement.

Catherine s’épongea le visage avec sa manche et le regarda. Il était sale, tout décoiffé, mais tout un chacun l’aurait quand même reconnu pour ce qu’il était.

Bolitho atteignit enfin la chambre et demanda à Allday :

— Alors, mon vieux, vous êtes sûr de vous, pour le vent ?

Allday se tourna vers lui en clignant des yeux. Sa bouche était desséchée et il avait grand-peine à parler.

— Ouais, sir Richard. Il a légèrement changé de direction. L’est venu un peu plus ouest, je dirais.

Bolitho s’accroupit près de lui pour observer la mer. Il se sentait déborder d’affection pour cet être si fort, comme invincible. Si seulement ils avaient eu un compas ou un sextant… Mais ils n’avaient rien de tout cela, rien que le soleil le jour et les étoiles la nuit. Ils en étaient même réduits à estimer leur vitesse sur l’eau.

Il murmura :

— Admettons.

En se retournant, il vit que Jenour le regardait.

— Prenez la barre, Stephen, et tenez-la ferme.

Puis il attendit que les hommes se relèvent. Spectacle pénible. Ceux qui venaient de prendre un peu de repos quittaient le refuge des rêves pour retrouver une réalité qui leur offrait de moins en moins d’espoir. Les autres regardaient autour d’eux, hébétés, comme s’ils attendaient le coup de sifflet du bosco ou le bruit des piétinements sur le pont du Pluvier Doré.

Bolitho songea soudain à l’Angleterre, mais pas à celle qu’il venait de décrire à Catherine. Il se demandait ce que pensaient les gens, ce que bon disait. La malveillance allait bientôt effacer le sort cruel qui était le leur, comme on l’avait vu avec le brave Nelson. Et les autres joueraient des coudes pour prendre sa place.

Mais, dans les ports, dans les campagnes de l’Ouest, nombreux étaient ceux qui garderaient son souvenir. Pauvre Adam, il allait bientôt apprendre à leur tendre la main et à faire l’expérience de la médiocrité.

Il reprit :

— Mr. Bezant souffre énormément – il aperçut Yovell, qui déglutissait avec peine, et devina qu’il avait compris que cette odeur écœurante, nauséabonde, c’était la gangrène : Il me faut un volontaire. Le commandant Keen et mon maître d’hôtel savent comment s’y prendre.

Il se retourna et Ozzard arriva, comme par magie.

— Etes-vous bien sûr ? lui demanda Bolitho.

Ozzard le regarda sans ciller.

— Je ne peux pas souquer sur le bois mort, je suis incapable de prendre un ris ou de tenir la barre – il haussa les épaules : Mais pour ça, je m’y connais.

Bolitho jeta un coup d’œil à Allday qui se tenait derrière le petit homme, l’air sombre. Celui-là savait sur le compte d’Ozzard des choses qu’il ne répéterait jamais à personne.

Keen ordonna à Owen et à Tojohns :

— Mettez-vous aux avirons, débrouillez-vous pour nager et pour scier, il faut stabiliser le canot.

Puis il baissa les yeux sur la petite trousse de chirurgie que Catherine avait ramassée dans la cabine. Il essayait de ne pas trembler. Il n’avait pas oublié l’énergie mais aussi la douceur dont Allday avait su faire preuve à son égard. C’était à bord de l’Ondine, une frégate. Keen était alors âgé de dix-sept ans et il avait reçu un gros éclis dans l’aine. Sans se soucier du chirurgien, qui était ivre, Allday l’avait déshabillé des pieds à la tête et avait extrait le bout de bois au moyen de son couteau. Grâce au Ciel, Keen s’était évanoui sur-le-champ. Mais il en avait gardé cette terrible cicatrice. Et c’est ainsi qu’il avait survécu pour voir ce jour, grâce au courage et au talent d’Allday.

Il se sentit soudain pris de désespoir. Jamais Zénoria n’avait vu ni caressé cette cicatrice affreuse, formant un gros bourrelet ; jamais elle ne le ferait.

Bolitho comprit ce qu’il éprouvait.

— Nous sommes ensemble, Val. Ne l’oubliez pas.

Il aperçut Sophie, recroquevillée à l’avant, le visage enfoui dans la poitrine de Catherine. Ozzard demanda :

— Paré, sir Richard ?

Ils forcèrent le capitaine à desserrer les mâchoires et Ozzard lui versa une bonne rasade de cognac dans la bouche avant d’enfoncer une lanière de cuir entre ses dents.

Allday sortit son couteau, en examina soigneusement le fil comme il eût vérifié son coutelas avant de partir à l’abordage. Il fallait faire vivement : au couteau d’abord, puis à la scie. De toute façon, il allait en mourir. En tout cas, avant eux tous. Et que se passerait-il lorsqu’il n’y aurait plus qu’un seul survivant ? Un canot rempli d’épouvantails… Il essuya la sueur qui lui coulait dans les yeux. Le souvenir de ce second maître, Jonas Polin, lui revenait subitement, et sa petite veuve, si svelte, dans son auberge de Fallowfield. Lorsque la nouvelle arriverait jusque chez elle, comment réagirait-elle ? Et si elle ne se souvenait même plus de lui ? Il ordonna d’un ton bref :

— Tenez-le ferme.

Puis il baissa son couteau, le cœur soulevé par l’odeur insupportable.

Lorsque le couteau s’approcha de lui, Bezant ouvrit les yeux et regarda fixement la lame. Il poussa un cri horrible qui ébranla tout le canot. Ils se sentaient tous impuissants, comme maudits.

Une fois encore, c’est Owen qui rompit le silence :

— Hé, les gars, le vent se lève ! – sa voix se brisait presque : Oh, merci, mon Dieu, le vent !

Allday avait donc eu raison au bout du compte, tout comme il avait eu raison pour Bezant. Le capitaine rendit le dernier souffle, l’injure à la bouche, à la tombée de la nuit. Les avirons se jetaient en cadence dans les moutons qui s’étaient levés et la voile détrempée vrombissait au vent.

Tout en dorlotant et en consolant une Sophie complètement affolée, Catherine ne perdait rien de ce qui se passait. La voix de son homme qui dominait le fracas du vent pour dire une prière qu’il avait déjà dû prononcer si souvent, et les claquements de la toile. Elle boucha les oreilles de la jeune fille lorsqu’on bascula le corps par-dessus bord. Mais, même dans les profondeurs de l’abîme, il était dit que le capitaine du Pluvier Doré ne trouverait pas la paix. Le requin le priva de cette dernière consolation.

Le capitaine de vaisseau Valentine Keen leva les yeux pour observer la toile qui faseyait et empoigna brusquement la barre. Il eut un choc en voyant que la voile n’était pas bordée, il savait bien qu’il avait dû s’assoupir. Pis encore, pas un seul de ceux qui s’entassaient à bord du canot ne l’avait remarqué.

Une petite houle faisait onduler la mer, mais le vent n’était pas assez vif pour faire déferler les lames. Le soleil était presque sur l’horizon, bientôt l’air se rafraîchirait, et le labeur nocturne allait reprendre aux avirons et à la voile pour les faire repartir cap à l’est.

Il jeta un coup d’œil à ses compagnons. Certains étaient lovés dans les fonds, d’autres se reposaient, appuyés sur leurs avirons passés dans les dames de nage et rentrés.

Lady Catherine était assise dans la chambre. Elle avait un bout de toile sur les épaules et Bolitho était appuyé contre elle comme pour dormir.

Ozzard, agenouillé, faisait le compte des rations et vérifiait le niveau d’eau douce dans leur dernière barrique. Ils n’allaient pas tenir très longtemps ainsi. Une journée de plus, et le désespoir ferait sauter les dernières résistances, comme une fièvre insidieuse.

Le brigantin s’était échoué sur le récif depuis plus d’une semaine et cela leur avait paru dix fois plus long. Leurs maigres vivres étaient épuisés, à l’exception d’un sac de biscuits. Ils avaient du cognac pour les malades, un peu de rhum lorsque l’eau douce serait finie. Demain ? Après-demain ?

Catherine s’agitait, elle émit un bref sanglot. Bolitho se réveilla comme un ressort et l’entoura de son bras pour amortir les mouvements de tangage et de roulis du canot cloqué par le soleil.

Keen essayait de ne pas trop songer au passé, à toutes ces années, vingt pour être précis. Ils servaient alors tous les deux dans les mers du Sud. Bolitho, jeune capitaine de frégate, commandait La Tempête. Lui était enseigne de vaisseau. Cette fois également, ils avaient dû évacuer le bord dans un canot non ponté. Bolitho s’en souvenait certainement, lui aussi, ainsi que de la jeune femme morte entre ses bras.

C’était une grande chaloupe, plus longue que le canot où ils se trouvaient à présent. Allday était aussi à bord. Il avait dû appeler les autres à la rescousse pour le maîtriser lorsque Bolitho, après l’avoir lesté d’un bout de chaîne, avait très doucement fait passer le corps de la défunte par-dessus bord.

Comment Bolitho aurait-il pu oublier, surtout maintenant, depuis qu’il avait trouvé un amour qui lui avait été si longtemps refusé ?

Allday, affalé dans les fonds, dodelinait de la tête, ses cheveux gris tout ébouriffés volaient au vent.

Keen sentait ses yeux le piquer sous le coup de l’émotion en se rappelant ce qui s’était passé deux jours auparavant. Ils avaient cru défaillir lorsqu’un grain énorme avait émergé de l’obscurité et leur était arrivé dessus comme un gigantesque rideau, faisant bouillonner la mer. Ils s’étaient tous réveillés, ramassant à la hâte des seaux, des morceaux de toile, des gobelets même, pour essayer de recueillir le maximum d’eau de pluie.

Puis, comme si la main d’un géant avait dévié sa course, le grain avait viré de bord à une demi-encablure.

Tucker, ce jeune matelot de Plymouth, avait craqué. Il s’était mis à sangloter. Des sanglots à vous briser le cœur et qui ne s’étaient tus que lorsque, épuisé, il s’était endormi.

C’est Catherine qui avait réagi. Elle avait dit à Allday :

— Eh bien, John Allday ! Je vous ai entendu chanter dans les jardins de Falmouth – vous avez une très jolie voix !

Elle s’était alors tourné vers Yovell :

— Vous êtes bien de mon avis ?

Et Allday s’était exécuté. Les premières étoiles se levaient, ils essayaient de reprendre un bon cap. Allday, assis à la barre, avait entonné une chanson fort appréciée des marins, écrite par un compositeur qui les aimait tant, Charles Dibdin. On disait qu’il était également l’auteur du célèbre Comment l’Hypérion s’est frayé un chemin, en commémoration de son dernier et si vaillant combat.

Les paroles disaient que, pour le plus endurci des marins qui prenaient la mer et affrontaient les périls et la cruauté du métier, il se trouvait toujours, et même dans les pires circonstances, un ange perché en tête de mât et qui veillait sur lui.

 

Dégagez les débris, brassez les vergues, saisissez ce qui bouge,

Sous misaine avisée, nous filons comme le vent :

Tenez bon, les gars ! Me croit-on assez chiffe molle,

Pour me laisser émouvoir par ces broutilles ?

Car on dit qu’un ange gardien est assis là-haut

Et qu’il veille sur la vie du pauv’mat’lot.

 

Epuisés, couverts de cloques, torturés par la soif, ils avaient écouté cet air et cru pendant quelques instants qu’ils étaient tirés du danger.

Certains pleuraient, Jenour se cachait la tête entre les mains. Sophie avait les yeux rivés sur Allday, le regardant comme s’il s’agissait de quelque magicien.

Bolitho s’éclaircit la gorge :

— Comment ça se passe, Val ?

Keen leva les yeux pour observer les étoiles.

— Pour autant que je puisse en juger, nous faisons cap plein est. Mais je suis bien incapable d’estimer la dérive.

— Aucune importance.

Bolitho serra l’épaule de Catherine, sa peau était si douce sous la chemise souillée, elle était chaude, brûlante même. Il dégagea quelques cheveux qui lui barraient les yeux et vit alors qu’elle le regardait. Elle s’inquiétait pour lui comme toujours, mais sa belle énergie commençait à l’abandonner. Même elle.

— Combien de temps pouvons-nous tenir encore, mon chéri ?

Il pressa sa joue contre sa chevelure.

— Un jour. Deux peut-être.

Il avait répondu à voix basse, mais les autres le savaient sans doute tout aussi bien que lui.

Le matelot Tucker éclata soudain d’un rire énorme, mais se tut aussitôt. Il avait la gorge trop sèche. Bolitho montra du doigt les avirons :

— Il est l’heure de reprendre, une bordée puis l’autre !

Keen s’exclama :

— Mais qu’est-ce qu’a Tucker ?

Owen répondit d’une voix pâteuse :

— Il a bu un peu d’eau de mer, commandant.

Et il lui montra l’eau qui affleurait le plat-bord avant de refluer.

— Dans ce cas, murmura Allday entre ses dents, il est foutu.

Il avait prononcé ces mots sans manifester la moindre émotion.

— Quel imbécile !

Tucker lâcha son aviron et se jeta en abord, mais Jenour et Cuppage réussirent à le rattraper et à le ramener au pied du mâtereau. Cuppage empoigna une longueur de lance-amarre et ligota mains dans le dos l’homme qui prononçait des mots incohérents.

— Ferme donc ton clapet, espèce d’idiot !

Bolitho gagna la place de Tucker et commença à nager. L’aviron pesait dix fois plus lourd qu’avant. Il essaya de ne pas entendre Tucker qui criait toujours de sa voix éraillée. Le commencement de la fin.

Catherine alla s’asseoir près de Keen tandis qu’Ozzard puisait de l’eau, un quart à la fois, sous le couvercle en cuir qui fermait la barrique.

Keen leva celui qu’il lui avait tendu jusqu’aux lèvres de Catherine.

— Buvez très lentement, par petites gorgées.

Mais elle trembla violemment et faillit même laisser tomber le gobelet en entendant Tucker qui vociférait : « De l’eau ! Donne-moi de l’eau, espèce de pute vérolée ! »

On entendit dans la nuit le choc d’un poing qui s’écrasait sur des os, et puis plus rien. Catherine murmura :

— Il ne fallait pas, j’ai déjà entendu bien pis.

Keen s’essaya à sourire. Ce n’est pas seulement par égard pour elle qu’Allday avait fait taire Tucker. S’il piquait encore une crise, il risquait de mettre tout le canot à feu et à sang.

Il tâta le pistolet passé dans sa ceinture et tenta de se rappeler : qui d’autre était armé ? Elle surprit son geste et lui dit doucement :

— Vous êtes déjà passé par là, Val… Je le sais bien.

Mais elle se détourna en entendant quelque chose tomber lourdement à la mer. Le requin ou sa victime, impossible à dire dans la nuit. Elle reprit :

— Il ne faut pas qu’il me voie souffrir.

Elle essayait de parler d’une voix plus assurée, mais elle tremblait de tous ses membres.

— Il a suffisamment souffert à cause de moi.

— Avant partout !

Une fois encore, les avirons plongèrent dans l’eau et se relevèrent. On passait précautionneusement l’eau douce de main en main.

Puis on releva la bordée au travail et Bolitho vint s’écrouler dans la chambre près d’elle.

— Comment va ton œil ?

Bolitho se força à sourire.

— Mieux que je n’aurais cru.

Il l’avait vue s’entretenir avec Keen et avait deviné son désespoir plus qu’il ne l’avait perçu.

— Tu me mens.

Elle se pencha vers lui et le sentit se raidir.

— Arrête de te faire du souci pour moi, Richard… C’est moi qui suis la cause de tout ce qui t’arrive. Tu aurais dû me laisser dans cette prison. Tu n’aurais peut-être même jamais su…

De hautes formes blanches surgirent de l’ombre et entamèrent quelques cercles autour du canot avant de disparaître. Bolitho répondit :

— Demain, ces oiseaux iront se poser en Afrique.

Elle dégagea ses cheveux détrempés au moment où une gerbe d’embruns passait au-dessus du plat-bord.

— J’aimerais tant être dans un endroit perdu, Richard. Notre plage, peut-être… Nager nue dans la mer, t’aimer, allongée sur le sable.

Et elle se mit à pleurer tout doucement, enfouie contre son épaule. On l’entendait à peine.

— Simplement, vivre avec toi.

Elle s’était profondément endormie lorsque Tucker, le jeune marin, mourut étouffé. Les hommes restaient effondrés sur leurs avirons, comme incapables du moindre intérêt pour quoi que ce fût. Seul Yovell se signa dans l’obscurité lorsque le corps bascula dans la mer avant de disparaître.

Bolitho prit Catherine par les épaules, paré à la protéger si un requin attaquait brusquement. Mais il ne se passa rien de ce genre. Les requins avaient la patience de tous les attendre.

Lorsque les premières lueurs de l’aube commencèrent à éclairer la mer alentour, Catherine s’aperçut que Tucker n’était plus là.

Le simple fait de songer à ce qu’il avait dû endurer pendant ses derniers moments de folie était insupportable. Tout était fini pour lui. La délivrance.

Elle vit qu’Ozzard mesurait le niveau dans la barrique, puis surprit le signe de tête imperceptible qu’il adressa à Bolitho.

— Bon, un demi-quart alors ?

Bolitho le suppliait presque.

— Moins que cela, répondit Ozzard en haussant les épaules.

Sophie s’approcha précautionneusement, passant par-dessus les jambes allongées un peu partout, les corps de ceux qui n’étaient pas de quart. Catherine lui tendit les bras :

— Qu’y a-t-il, Sophie ? Venez me voir.

La jeune fille lui prit la main en hésitant.

— N’est-ce pas la terre ? Là, par là ?

On aurait dit qu’elle avait peur d’être devenue folle, comme Tucker.

Keen lâcha son aviron, se leva et s’abrita les yeux pour observer.

— Oh ! Mon Dieu, c’est la terre !

Allday leva le regard vers la tête de mât et s’essaya à une plaisanterie :

— Voyez pas ? Il est là-haut, il veille sur la vie du pauv’mat’lot !

Au fur et à mesure que la lumière se faisait plus vive, il devint évident que la terre aperçue par Sophie n’était qu’une île, et encore. Mais sa seule proximité donna un regain de vigueur aux hommes. Lorsqu’on eut repris les avirons et établi la voile, Bolitho ne réussit pas à trouver le moindre signe de dépit sur ces visages brûlés par le soleil.

Entre deux plongeons de son aviron, Keen lui demanda :

— La connaissez-vous, amiral ?

En se retournant, Bolitho croisa le regard de Catherine.

— Oui, je la connais.

Il aurait dû se sentir heureux, fier même, d’avoir réussi à les conduire jusqu’ici. Au moins, ils n’étaient plus condamnés à naviguer au milieu d’un horizon vide, vide à en devenir fou.

Jenour lui demanda d’une voix haletante :

— Et porte-t-elle un nom, sir Richard ?

Elle le fixait toujours, elle lisait dans ses pensées à livre ouvert.

Elle savait la désespérance, ce désespoir brutal que faisaient surgir chez lui ces vieux souvenirs qui lui rappelaient cet endroit. Cet aspirant, qui avait été son ami et dont il ne parlait que rarement, même à elle. Tous ces souvenirs étaient également pénibles.

C’était un endroit désolé, une île comme on cherche à les éviter à tout prix, bordée de rochers assez traîtres. On était en territoire de traite, elle avait aussi servi dans le temps de repaire à des pirates. Mais ceux-là s’en étaient allés plus au sud, vers des contrées plus riches, le long des routes maritimes qui menaient au cap de Bonne-Espérance ou qui passaient à proximité.

— Je ne me souviens plus de son nom.

Même cela, c’était un mensonge. Cet îlot hostile était connu des négociants locaux comme l’île des Morts-vivants. Rien n’y poussait, nul ne pouvait y vivre. Il fit brusquement :

— A vingt milles d’ici, il existe une autre île avec une végétation luxuriante, des arbres. On y trouve des torrents, du poisson.

Yovell lui demanda très poliment :

— Ainsi donc, nous ne pouvons rien attendre de cet endroit ?

Il semblait si désemparé que Bolitho lui répondit :

— Il y a peut-être quelques trous dans les rochers où s’accumule beau de pluie. Et des coquillages.

Il les vit s’affaisser, comme le sable s’épuise dans le sablier. Il insista pourtant :

— Qu’en dites-vous, tout le monde ? On essaie déjà celle-ci ? Nous pourrions aller ramasser des coquillages et les mélanger aux biscuits de mer.

Yovell parut se satisfaire de cette proposition.

— De toute façon, amiral, nous ne pouvons rien faire d’autre, n’est-ce pas ? Pour le moment en tout cas.

Owen quant à lui se fendit d’un sourire et essuya ses lèvres gercées.

— Ça, c’est bien dit, amiral ! Vingt malheureux milles après ce que nous venons de faire ? S’il y avait pas les requins, je s’rais capable d’y aller à la nage, pour vrai !

Catherine les voyait revenir à la vie : évanouis les spectres vivants qu’ils étaient devenus… Mais combien de temps encore pourrait-il les entraîner ?

À midi, le canot pénétra dans une petite anse parsemée de rochers que l’on percevait dans l’eau transparente, si transparente qu’on aurait pu ne pas la voir.

Tandis qu’ils progressaient au-dessus de leur ombre, Bolitho se leva et s’abrita les yeux.

— Parés avec le grappin ! Stephen, Owen, à l’eau ! Vous autres, sciez !

L’aide de camp et le veilleur à la vue si perçante avancèrent, glissant et pataugeant sur le fond tout en guidant l’étrave entre les têtes de roches. Le canot s’immobilisa enfin.

Bolitho vit les hommes tituber, s’écrouler sur la plage en pente douce, puis grimper en courant. Un gros navire était une chose, être restés si longtemps entassés dans une petite embarcation non pontée en était une autre. Ils chancelaient comme fies ivrognes.

Catherine eut la surprise de voir Allday lui tendre une paire de sandales en cuir qu’il avait confectionnées avec la sacoche d’Ozzard. Elle le remercia d’une voix rauque :

— Vous êtes un amour, John.

Allday était tout confus, il en oublia même un instant les dangers que pouvait receler un endroit comme celui-ci.

— Y a pas d’quoi, milady, comme que dirait Yovell, j’avais rien d’autre à faire.

Bolitho l’accompagna entre les récifs puis attendit qu’elle eût attaché ses sandales. Elles se montrèrent précieuses, le sable était brûlant.

— Val, prenez votre maître d’hôtel avec vous et montez au sommet de la colline. Avec cette lumière, vous pourrez peut-être apercevoir l’autre île… ça les réconfortera.

— Amiral, lui répondit Keen, l’air grave, je crois que vous vous y êtes déjà bien employé.

Allday allait débarquer à son tour lorsque Ozzard le tira par la manche.

— Regarde-moi ça, John !

C’était une petite bourse de cuir fermée par un lien et qui pesait son poids, soigneusement dissimulée derrière la barrique vide. Allday la tâta :

— C’est de l’or, mon vieux.

— Mais à qui appartient-il ?

— Je sais pas, mais celui qui l’a mis là doit être un des mutins, ça c’est sûr !

Ils replacèrent le sac dans sa cachette.

— Je m’en occupe, conclut Allday.

— Je vais aller surveiller ce qu’il nous reste de vivres. Et tout particulièrement le rhum, ajouta Ozzard d’un air entendu.

Keen avait entrepris l’escalade de la colline, point dominant de cette île dénudée. En fait, il ne s’agissait guère que d’un mamelon brûlé par le soleil. Comme ils passaient auprès de quelques rochers posés çà et là, Tojohns lui dit :

— Bon sang, regardez-moi ça !

C’était un squelette, celui d’un homme tombé à cet endroit : naufrage, esclave fugitif, victime d’un meurtre, nul ne le saurait jamais.

Ils étaient presque arrivés au sommet. Keen essayait de ne pas penser à l’eau douce, ni même seulement au bruit du liquide que l’on verse dans un verre.

Sur la crête, Keen tomba soudain à genoux et ordonna brutalement :

— Couché, mon vieux !

Ils apercevaient l’autre île, comme Bolitho l’avait prévu, elle faisait une tache verte un peu floue sur l’horizon.

Mais ce qu’avait vu Keen, c’était un navire à l’ancre juste sous ses pieds, le brick qu’ils avaient déjà remarqué depuis la mâture du Pluvier Doré. Le négrier avait dû rappliquer pour récupérer l’or, l’or désormais dispersé sur le grand récif.

— Je descends prévenir les nôtres. Vous, Tojohns, restez ici. Si vous voyez un canot rallier la terre, revenez immédiatement.

Il dévala la colline desséchée, encore tout étonné de ce qu’il venait de découvrir. Si désolé qu’il fût, cet endroit désert avait représenté le couronnement de leurs efforts. Désormais, il n’était plus qu’un piège.

Bolitho écouta son récit sans un commentaire. Il ne quittait pas des yeux Sophie et Ozzard, occupés à ramasser les coquillages que les hommes de Jenour venaient de repérer dans une mare.

Ils se mirent tous en cercle, attendant de savoir ce que pensait Jenour qui remplissait un quart dans une baille. Il avait puisé de l’eau dans un petit ruisseau au flanc de la colline. Il finit par rendre son verdict :

— C’est de l’eau de pluie. Je vais la transvaser dans le tonneau.

Yovell serra dans ses bras la jeune servante, rayonnant de bonheur.

— Eh bien, ma chère enfant, c’est comme du vin !

Bolitho les interrompit :

— Écoutez-moi, tout le monde. Le négrier qui nous suivait est ancré par là-bas.

Il vit que ce qu’il disait faisait mouche.

— Et nous ne pourrons pas survivre ici.

Il songeait au squelette aperçu par Keen. Il y en avait sans doute d’autres.

— Nous repartirons donc à la tombée du jour – il leur laissa le temps de bien s’en pénétrer : Nous devons absolument rallier l’autre île. Il souffle une bonne brise… nous ne devrions même pas avoir besoin des avirons.

Allday observait les réactions des marins, et tout particulièrement des deux rescapés de l’équipage du Pluvier Doré. Non, pas Owen, sûrement pas. Il avait amplement prouvé qu’il était loyal. Alors, ce gars coriace, Cuppage ? Mais il n’avait pas changé de tête lorsqu’il avait été question du négrier. C’était peut-être Tucker, devenu fou d’avoir bu de beau de mer, mais il avait emporté son secret avec lui. Ou même le vieux capitaine Bezant : quelque compensation dérisoire pour la perte de son navire, à cause de gens à qui il faisait confiance.

Allday serra le vieux poignard passé dans sa ceinture. Peu importe qui, je m’occuperai personnellement de l’expédier en enfer !

Il y avait un endroit où les arbres, tombés, gisaient sur le sable comme des os blanchis. Catherine prit Bolitho dans ses bras et le tint un bon moment serré tout contre elle, à l’écart des curieux.

Ils restèrent ainsi, les yeux dans les yeux, sans prononcer un mot. Puis elle lui dit doucement :

— J’avais fini par douter. À présent, je sais que nous nous en sortirons.

En haut de la colline, le squelette nettoyé par le sable les entendait peut-être et partageait leur espoir. Un espoir qui avait été le sien.

 

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